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20 mars 2011 7 20 /03 /mars /2011 17:51

Isabella, ma belle Borgward  allemande et le lycée de Sousse.

 

Pour m’amener à de meilleurs sentiments et me faire renoncer à présenter ma démission, Papa décida d’utiliser ses dernières économies pour m’acheter une belle voiture d’occasion.

 

J’en avais remarqué une très belle que conduisait Valfredo Caminiti le mécanicien en chef du concessionnaire Peugeot à Nabeul. J’appris que c’était sa propre voiture et qu’elle n’était pas à vendre et bien que Valfredo ait été alors le manager de l’équipe de basket du Stade Nabeulien et qu’il m’aimait bien, il ne consentit à s’en séparer qu’au moment où ce fut Papa qui lui en fit la proposition.

 

Valfredo vivait en effet en concubinage avec une dame divorcée dont la mère, italienne d’origine avait épousé un tunisien musulman, et qui était ainsi tunisienne et musulmane, bien que de culture plutôt européenne. Le couple mixte, doublement illégitime, se faisait le plus discret possible, mais résidant dans notre voisinage immédiat, Valfredo savait très bien que, seule l’ouverture d’esprit de mon père, qui aurait très bien pu les obliger à déménager depuis longtemps, leur permettait de continuer à vivre paisiblement leur concubinage.

 

Aussi, sitôt la proposition d’achat formulée, Valfredo se dit-il enchanté de pouvoir être agréable à Papa et alla jusqu’à lui faire un bon prix en se chargeant même de faire les formalités d’enregistrement du véhicule à mon nom.

 

Pour régler la question de mon hébergement à Sousse, c’est encore Papa qui me donna de l’argent pour une semaine d’hôtel, en me disant qu’à mon retour à la fin de la semaine, il aura trouvé une solution plus durable. Aussi, je ne pouvais plus reculer et c’est au volant d’une très belle voiture allemande, de marque Borgward, modèle Isabella que je rejoignis fièrement le lycée de garçons de Sousse pour signer ma déclaration d’arrivée et me faire délivrer mon emploi du temps.

 

Je devais enseigner l’éducation physique le matin au lycée et consacrer mes après-midi, à recruter et entraîner des élèves des écoles primaires voisines de la Maison des Jeunes.

 

En me rendant en début d’après-midi à la Maison des Jeunes, ma première surprise fut de découvrir que la fameuse piscine était un petit bassin de plein air et qu’il n’était pas question de songer à y faire fonctionner une école de natation en dehors des mois d’été.

 

La seconde déconvenue a été d’apprendre que le système de filtrage de l’eau de la piscine était détérioré depuis un an et qu’on ne savait pas s’il allait pouvoir être réparé, ni par qui…

 

Je rédigeai un rapport que j’adressai à Monsieur Chéhata, sous le couvert de mon proviseur de lycée, signalant ironiquement les faits concernant la piscine et mettant à demi mots, en cause l’inspecteur principal dans la désinformation du Directeur Général pour l’amener à me muter de manière aussi inappropriée que malveillante…

 

Une semaine après, j’étais en discussion amicale avec deux professeurs d’éducation physique belges dans le vestiaire du terrain de sport situé sous les remparts de Sousse face à une entrée annexe du lycée, lorsque je vis arriver Boulogne traversant la route et se diriger vers la petite porte d’accès à notre lieu de travail.

 

Une minute après nous avoir lancé un bonjour messieurs ayant plus l’air d’une insulte que d’un salut, il m’apprit en usant d’un ton ironique et délibérément provocateur, « qu’il était venu voir si la formation que j’avais reçue à Ksar Saïd et à Paris allait me permettre d’enseigner correctement et que, pour ce faire, il se proposait de m’inspecter et de me noter. »

 

Piqué au vif et décidé à ne pas me laisser intimider, je lui répliquais sur le même ton "qu’il était libre de faire ce qu’il entendait, mais que je doutais fort qu’il soit à même de juger de ce que ma formation allait me permettre de faire aujourd’hui."

 

Mes élèves étaient arrivés pendant l’interclasse, alors que je discutais avec mes collègues, ils s’étaient mis en tenue et m’attendaient lorsque Boulogne était arrivé. Lui ayant retourné sa pique, je lui tournais le dos et me dirigeais vers mes élèves que j’abordais en leur adressant un bonjour joyeux en langue arabe et, sans m’occuper de Boulogne qui me collait aux basques, je procédais rapidement à l’appel, puis j’annonçais aux élèves que nous allions nous dérouiller les jambes.

 

Je les fis sortir du terrain en groupe et, en leur recommandant de suivre mon rythme et de rester groupés autour de moi, je me mis à trottiner en grimpant la pente vers les catacombes.

 

Mes premières foulées très lentes, étaient destinées à piéger Boulogne qui, en costume, cravate et chaussures de ville, tomba dans le panneau et se mit à marcher rapidement derrière nous. Aussitôt, j’accélérai insensiblement pour l’enferrer davantage dans l’hameçon et, j’eus le plaisir de le voir relever le défi en desserrant sa cravate et en se mettant à trottiner.

 

Nous avions alors parcouru une bonne centaine de mètres et il ne pouvait plus se permettre de se défiler au risque de se discréditer aux yeux des élèves.

 

Et je me mis à m’amuser à le mettre sur les genoux. J’accélérais ainsi brutalement le rythme sur 200mètres jusqu’à le distancer d’une bonne trentaine de mètres, puis en ralentissant fortement, je le laissais regagner du terrain jusqu’à presque nous rattraper, je repartais alors en entraînant les élèves qui, commençaient à comprendre ce qui était en train de se passer et à s’en amuser, ce qui rajoutait à leur joie de courir et de souffler en cadence…

 

Boulogne avait, en cette période de collaboration avec l’administration tunisienne, poussé le charlatanisme jusqu’à soutenir auprès de Mzali qu’il était un excellent entraîneur de handball (sic) ;et il avait ainsi persuadé ce dernier de lui confier la direction des entraînements de l’équipe nationale.

 

Et n’ayant pas de bases techniques suffisantes, il avait axé l’essentiel de son travail sur la musculation en salle, sur des matches amicaux et sur les footings qu’il suivait en vélo.

 

C’est probablement ce qui lui vait laissé croire qu’il serait capable de suivre un nageur et ses élèves à la course à pied…mais au bout de dix minutes de changements de rythmes de plus en plus violents, il était au bord de l’asphyxie et on l’entendait de loin souffler comme un phoque.

 

Au bout d’un quart d’heure, n’en pouvant plus, il cessa de courir derrière nous et commença à revenir vers le terrain en redescendant la pente, en marchant d’un bon pas… L’ayant constamment surveillé du coin de l’œil et notant son abandon, je tournai aussitôt les talons et entraînant mes élèves à ma suite, je le rattrapai rapidement.

 

En le doublant, je m’arrangeai pour le frôler d’assez près pour le déstabiliser dans sa marche, tout en criant à mes élèves le message que je lui adressais en fait par ricochet, « d’éviter de trop présumer de leur force et de ne pas courir plus vite que ne peuvent le supporter leurs jambes rouillées…»

 

Arrivé à hauteur du portail du terrain, je fis entrer mes élèves et leur fis faire des exercices d’assouplissement et de musculation abdominale puis, les répartissant en plusieurs équipes de six, je leur fis jouer des mini-matchs de handball par périodes de trois minutes de jeu rapide, l’équipe gagnante restant chaque fois sur le terrain et l’équipe perdante cédant sa place à une autre.

 

Les élèves qui étaient en majorité de bons sportifs, se débrouillaient très bien et je les encourageais de la voix et du geste, sans accorder le moindre regard à Boulogne qui, ayant remis un semblant d’ordre à sa tenue vestimentaire, avait pris position sur une chaise en face de moi, de l’autre coté du terrain de handball et commençait à prendre des notes.

 

La séance s’acheva par des exercices de retour au calme et de relaxation et je remerciai les élèves en les libérant et en me dirigeant vers le vestiaire des profs. Mon planning comportait encore une séance avec une autre classe avant la pause du déjeuner, mais Boulogne vint me demander de le suivre au bureau du censeur, devant lequel, me dit-il, il se devait de me faire des remarques pédagogiques.

 

Sans lui répondre directement, je demandais à l’un de mes collègues belges d’avoir l’amabilité de renvoyer ma nouvelle classe en salle de permanence.

 

Je commençais à ôter mon survêtement pour endosser ma tenue de ville, quand Boulogne, me dit d’un air courroucé que ce n’était pas la peine et que je pouvais très bien garder mon survêtement.

 

A cette époque de ma vie, j’avais un flegme incroyable et j’étais doué d’un grand sens de la répartie ironique, ce qui avait la faculté de déstabiliser mes interlocuteurs quels qu’ils soient, copains, surveillants de lycée ou professeurs. Je voyais bien que Boulogne faisait des efforts pour contenir sa colère et, je décidais de le pousser à bout. Je lui répliquai d’un ton sarcastique, en lui tournant le dos et en laissant tomber mon pantalon de survêtement et mon slip dans le même geste, lui exposant mes fesses nues : Monsieur Boulogne, à votre place j’éviterais de donner des conseils vestimentaires. Libre à vous de faire vos footings en costume cravate, mais, s’il vous plait, Monsieur l’inspecteur (avec une intonation ironique plus marquée) laissez-moi donc m’habiller comme me l’ont appris mes parents pour aller voir des responsables !

 

Boulogne était vert de rage, il sortit du vestiaire où j’avais continué à me déshabiller. Je pris une douche rapide et mis mes vêtements.

 

Ce jour là, il faisait très beau et je portais une tenue très élégante avec une chemise en soie verte, un pantalon en flanelle, des mocassins noirs et un veston léger et assorti, également en flanelle. J’avais été séduit par l’ensemble exposé dans une vitrine chic du Boulevard des Capucines à Paris et je l’avais acheté dans sa totalité.

 

En sortant du vestiaire, j’avais fière allure et en notant ma tenue impeccable, mes cheveux bien peignés, mon allure décontractée et légèrement méprisante, Boulogne eut un geste à peine perceptible de dépit. Sa tenue vestimentaire doublement fripée par son parcours en voiture et par son footing impromptu, ne servait en rien son allure générale de paysan endimanché, de surcroît en sueur.

 

J’achevais de l’écraser en le narguant un peu plus et je me dirigeai vers ma belle voiture garée devant la porte du lycée, ouvrai la portière et jetai nonchalamment mon sac de sport sur la banquette arrière.

 

Puis, me retournant théâtralement vers lui, j’inclinais légèrement le buste en tendant mon bras vers la porte du lycée, lui indiquant que maintenant, j’étais prêt à le suivre…

 

L’entretien qui s’est déroulé par la suite dans le bureau du censeur acheva de lui mettre le moral à zéro. Il n’avait visiblement pas encore pris toute la mesure de mon impertinence et en frappant à la porte du censeur, il me demanda d’attendre qu’il me fasse appeler mais il eut la surprise de m’entendre lui répliquer flegmatiquement : Pas question, mon bon monsieur !!

 

Et lorsque je m’engouffrais à sa suite dans le bureau, il n’insista pas et n’essaya pas de m’en empêcher.

 

Le censeur nous accueillant en souriant et nous invitant du geste à nous asseoir, je m’installais dans le fauteuil qui faisait face à celui que Boulogne avait choisi d’occuper.

 

Une fois rentré à Tunis, Boulogne aurait eu toute la latitude de faire son rapport au Service de l’Education Physique et des Sports et de m’y accuser de tout ce qui aurait pu lui passer par la tête, avec des chances assez sérieuses d’être cru sur parole. Mais il avait compris cependant, que je ne me serais pas laissé faire et, que j’aurais sans doute, rédigé un contre-rapport avec les témoignages éventuels des collègues belges vis avis desquels il avait pas été particulièrement discourtois, ne s’étant pas privé de leur faire des remarques aussi déplaisantes que gratuites.

 

C’était sans doute pourquoi il avait imaginé de me confondre en présence d’un responsable en la personne du censeur, professeur de français, ne connaissant, en principe, pas grande chose à l’éducation physique.

 

Dans sa colère et sa bêtise il avait simplement oublié que les règles pédagogiques et administratives d’une inspection d’un enseignant étaient sensiblement les mêmes, indépendamment de la spécificité de la matière d’enseignement dont il s’agit. En outre, il était de mauvaise foi et cela ne cessait de transparaître à travers son discours auquel il s’évertua de donner une apparence objective et détachée, sans vraiment y parvenir.

 

Pendant près de 10 minutes, il me chargea de tous les maux :

 

L’administration m’avait accordé le privilège de m’envoyer achever ma licence à Paris.

Le Directeur Général avait bien voulu me faire confiance en me confiant la mission de mettre en place une école de natation à Sousse.

En retour, je refusais de collaborer. Je refusais de mettre en place l’école de natation en avançant des prétextes fallacieux.

En outre, il était venu voir s’il pouvait m’aider à résoudre les problèmes que j’avais évoqués dans ma correspondance à l’administration mais, que pour le remercier de sa démarche, je m’étais montré impertinent en présence de mes collègues et j’avais essayé de l’humilier devant mes élèves…

 

Au fur et à mesure de l’exposé de ses mensonges, voyant que je ne disais rien, il s’échauffait de plus en plus, devenant incohérent et agressif après avoir commencé son discours d’un ton calme.

 

Je profitai d’une chute de phrase, pour m’adresser au censeur d’un ton très calme en lui demandant de me donner la parole un bref instant, pour une déclaration officielle dont je lui saurais infiniment gré de bien vouloir la transmettre à qui de droit dans un procès-verbal de la réunion de ce jour.

 

Surpris par ma réaction calme et, quelque peu inquiet de ce que j’allais pouvoir déclarer, sachant très bien ce qu’il avait à se reprocher, Boulogne se tut, indiquant ainsi qu’il avait fini son exposé.

 

Le censeur me donna la parole d’un geste et je commençai par le commencement :


 L’administration, m’a réellement accordé ledit privilège, mais je l’avais mérité, ainsi que mes collègues, par mes notes et mon classement final.

 Je suis tunisien de père et de mère, mais ayant une ascendance turque d’un côté et andalouse de l’autre, la majorité de ceux qui ne me connaissent pas me prennent pour un européen.

 Ma maîtrise de la langue française et ma culture générale font qu’il est difficile pour mes interlocuteurs, notamment français de ne pas me prendre pour un compatriote ; je rappelais au censeur que lors de notre première rencontre, il m’avait lui-même pris pour un Français.

 Et je relatais dans le détail ce qui s’était passé avec la secrétaire puis avec Boulogne dans son bureau.

 

Au moment où je citais ce que Boulogne m’avait dit en croyant avoir affaire à un français et en traitant les Tunisiens de «sales têtes et (de) bicots», celui-ci avait voulu m’interrompre, mais haussant le ton, je lui demandai de ne pas m’interrompre et d’avoir la même courtoisie que j’avais eue envers lui en le laissant exposer tout ce qu’il avait voulu inventer sans l’interrompre, puis l’attaquant sur le domaine pédagogique et m’adressant de nouveau au censeur, je lui demandai s’il avait jamais eu connaissance d’un inspecteur venant inspecter et noter un professeur stagiaire durant son premier mois d’exercice…

 

Me tournant à nouveau vers Boulogne, je lui dis : Mes collègues belges, que je ne connais que depuis moins d’une semaine, pourraient, si besoin est, corroborer le fait que vous m’avez bien déclaré d’un ton ironique et menaçant que vous étiez « venu voir si la formation que j’avais reçue à Ksar Saïd et à Paris allait me permettre d’enseigner correctement et que, pour ce faire, vous alliez inspecter mon travail et me noter. »

 

Et j’enchaînai, je vous informe Monsieur Boulogne que ma formation au sujet de laquelle vous ironisiez, a eu entre autres mérites, celui de m’apprendre que les bases élémentaires de la démarche pédagogique, auraient voulu qu’avant toute velléité d’inspection, on mette d’abord en place une série de contacts de soutien et de conseil aux enseignants débutants et que l’on ne songe véritablement à les inspecter qu’après leur avoir clarifié l’environnement pratique administratif, pédagogique et juridique dans lequel ils évoluent et après leur avoir précisé concrètement ce que l’on attendait d’eux.

 

Ceci étant, je ne suis pas idiot au point de croire un seul instant que vous êtes venu, comme vous l’annonciez à monsieur le censeur « m’aider à résoudre mes problèmes. »

 

Monsieur Boulogne, Vous êtes venu à Sousse, mu par le seul désir de me créer des problèmes et vous venger de ce que j’avais écrit au sujet de la désinformation intentionnelle que vous aviez orchestrée pour me faire muter de Carthage et je vous mets au défi de pouvoir trouver la plus petite solution aux raisons que vous avez qualifiées de fallacieuses :

 

1/ Trouvez-moi une seule famille de Sousse qui consente à confier ses enfants à quelqu’un fusse-t-il inspecteur principal, pour des cours de natation dans un bassin d’été, découvert et insalubre.

2/ Faîtes réparer le système de filtrage de l’eau du bassin dans un délai de deux mois, sachant qu’il est en panne depuis près d’un an.

 

Monsieur Boulogne, avant de vous rencontrer pour la première dans votre bureau, vous ne me connaissiez pas du tout. Personnellement, je ne vous connaissais pas autrement que par ce qu’avait dit à votre sujet Monsieur Soubiran, votre malheureux compatriote, frustré de vous voir ne pas daigner lever le petit doigt pour lui venir en aide à la suite de l’accident de sa femme, accident dont elle a fini par mourir et qui a coûté la vie par ricochet à Monsieur Soubiran lui-même.

 

Monsieur Boulogne, je n’avais ainsi aucune raison de vous respecter et vous ne m’en avez fourni aucune depuis que je vous connais, mais je suis prêt à vous offrir en cadeau ma démission, au cas où vous parviendriez, par impossible, à régler l’une ou l’autre de ces raisons, d’après vous fallacieuses…

 

Au cours de ma déclaration, le censeur avait, par plusieurs fois, essayé de m’interrompre ou de tempérer mes propos, mais je continuais tout en lui assurant de la voix et du geste que j’en aurai bientôt fini, que je le laisserai après, juge de ce qu’il croira devoir faire et, que pour ma part, j’étais totalement prêt à assumer la responsabilité de chaque mot que j’aurai prononcé.

 

A la fin de ma déclaration, j’ajoutais que j’étais prêt à la confirmer par écrit et à en donner copie à la direction du lycée, à monsieur Mzali et à qui de droit au sommet du pouvoir politique et administratif.

 

Boulogne resta silencieux visiblement mal à l’aise, bouillant de colère contenue. Si l’entretien avait eu lieu ailleurs ou sans témoin, il aurait certainement trouvé moyen de retourner la situation, ne fusse qu’en criant au secours et en prétendant que j’étais en train de l’agresser physiquement et de l’injurier…Mais mes propos pour insolents qu’ils aient pu parfois paraître, étaient largement convaincants et relativement mesurés. C’est le censeur qui ménagea finalement une sortie plus ou moins honorable à l’inspecteur malveillant et hypocrite.

 

Après m’avoir demandé si j’avais autre chose à ajouter, il se tourna vers Boulogne et lui suggéra : Si vous n’y voyez pas d’inconvénient, nous allons permettre à monsieur Haouet de se retirer et d’aller déjeuner tranquillement à charge de nous revoir tous ici à 15 heures. Pour votre part, je vous retiens à déjeuner à la table d’hôte du lycée pour ne pas trop perdre de temps dans un restaurant.

 

Je pris moi-même le déjeuner à la table des professeurs du restaurant du lycée et j’eus ainsi, tout le loisir de les voir discuter en déjeunant en tête-à-tête dans une petite salle séparée pourvue d’une cloison de bois vitrée…

 

A 15 heures, j’appris de la bouche du censeur que Boulogne était rentré à Tunis mais qu’avant de partir, il avait convoqué tous les enseignants de Sousse pour une journée pédagogique qui aura lieu à la salle des professeurs du lycée le surlendemain à partir de 10 heures du matin.

 

En me remettant ma propre convocation, il me recommanda d’éviter de me créer des problèmes en début de carrière et d’apprendre à freiner mes tendances révolutionnaires. Il ajouta que pour cette fois-ci ma réaction et mon comportement, par ailleurs compréhensibles, auraient pu me coûter cher, mais que Boulogne avait fini par admettre que sur le plan pédagogique, je n’avais pas tort…

 

Effectivement, une réunion devait regrouper une vingtaine d’enseignants tous grades confondus, moniteurs, maîtres et professeurs d’EPS au cours de laquelle, Boulogne et Monsieur B.Chaabane, un inspecteur tunisien débonnaire et compétent, essayèrent de préciser le cadre de la mission générale de l’éducation physique au sein d’un lycée.

 

Boulogne essaya bien de garder un ton neutre, mais il ne résista pas longtemps à sa nature profonde en tenant des propos sarcastiques. Pour une fois, je choisis de l’ignorer et de ne pas répondre à ses provocations indirectes, mais ce sont d’autres collègues qui se chargèrent de lui apporter la contradiction et de souligner par ailleurs certaines de leurs difficultés quotidiennes, notamment de manque de matériels et de vétusté des infrastructures; difficultés auxquelles, bien entendu, il ne put apporter aucun début de solution…

 

Ce fut la première et la dernière fois que je rencontrais directement Boulogne dans le cadre du conseil et de l’inspection pédagogique, ce qui ne l’empêcha nullement de continuer pendant longtemps, d’essayer de me nuire…

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