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24 décembre 2010 5 24 /12 /décembre /2010 08:52

Infarctus, clinique, ambulance médicalisée (?) ni l’un, ni lune, ni l’autre !!!


 

Nous sommes en juillet 2010 et comme chaque année depuis fort longtemps, j’avais fini de m’installer dans ma maison de plage de Nabeul pour les vacances.

 

Le 5 juillet, j’avais fêté mon énième anniversaire entouré de mon épouse, de mes deux filles dont l’aînée venait de se marier en mai, et de mon fils,…. mes premiers anniversaires avaient été l’occasion, pour mes parents, les toutes premières bonnes raisons estivales de faire la fête, d’autant plus que ma sœur cadette était née,  jour pour jour, trois ans plus tard que moi, un 5 juillet !!!

 

Durant sa carrière, mon père avait pour coutume de prendre son congé annuel en juillet et d’organiser aussitôt notre installation dans cette même maison qu’il avait fait construire aux fins de vacances estivales, seule occasion notable de réunion de sa famille…Il était  fonctionnaire d’Etat, et donc trimballé d’un bout à l’autre du pays à travers diverses affectations, au gré de l’administration omnipotente…Ces vacances étaient ainsi pour lui l’occasion de se ressourcer dans son village natal, de nous y regrouper pour un temps et de jouir avec nous de la mer, à une dizaine de mètres de laquelle il avait fait construire, d’abord une seule et unique pièce, puis les dépendances d’usage et ensuite, une pièce supplémentaire, au rythme de chaque nouvelle naissance de ses cinq enfants, soit une pièce de plus tous les trois ans, puisque maman était à ce sujet un véritable métronome !!!

 

A la mort de mes parents et avec l’accord de mes frères et de ma sœur, j’avais hérité de la maison de plage familiale que j’avais quelque peu retapée et modernisée …

 

Il est banal de dire aujourd’hui que la vie avait défilé depuis, à une vitesse vertigineuse … mon fils aîné, Adnane, est âgé aujourd’hui de 45 ans, et dire qu’il y a 30 ans, je dirais plutôt 30 jours, alors qu’il n’avait qu’une quinzaine d’années et qu’il n’en pouvait plus d’attendre d’en avoir vingt, je lui avais dit ‘‘ne t’en fais pas jeune homme, tu les auras bien assez tôt… et tu n’en finiras pas de regretter d’en avoir, encore plus vite, quarante, voire cinquante…’’

 « Hier encore, j’avais vingt ans, lui chantais-je ironiquement… »

 

En fait, au début des années 60, j’avais eu 20 ans,  l’on prédisait alors la fin du monde pour l’année 2000 et je m’en souciais comme d’une guigne en me disant que, de toute manière, si je vivais jusque là, j’aurais alors 60 ans, ce qui pour moi était risible…moi, avoir un jour 60 ans…je me refusais simplement à l’imaginer !

 

J’en ai aujourd’hui 70! et, en ce mois de juillet, je venais donc de fêter mon anniversaire…

 

Il y a approximativement 20 ans, j’ai découvert sans surprise que je devenais diabétique, comme l’avaient été mes deux grands pères, mon père, ma mère et mes deux frères qui l’étaient tous devenus à un âge beaucoup plus précoce que moi, et qui tous, sauf ma mère, avaient décédé aux alentours de 55 ans !!!

 

J’ai toujours pensé que ma longue pratique du sport de haut niveau pendant ma jeunesse et les longues marches quasi-quotidiennes que je continue d’avoir jusqu’à ce jour, me permettraient d’avoir une protection valable contre les complications du diabète, qui, plus que le diabète lui-même, constituaient des dangers réels de dégénérescence physique, de cécité, d’amputation de membres voire de mort subite via les accidents cardiovasculaires…

 

Et en ce 26 juillet, comme les jours précédents, j’avais fait une longue séance de marche dynamique, et comme tous les jours après déjeuner, je faisais une petite sieste lorsque subitement je me réveillai avec une tension bizarre dans les deux bras et une sensation de pesanteur au niveau du thorax, et j’ai tout de suite pensé à un « infarctus silencieux » dont les cardiologues que j’avais consultés par précaution m’avaient dit qu’il était fréquent chez les diabétiques qui ne ressentent pas de vraie douleur lors de son apparition.

 

Je réagis au quart de tour et demandai à ma famille de m’amener de toute urgence à la clinique de Nabeul, qui, par chance, se trouvait à moins 700mètres de  chez moi.

 

Il était alors près de 15h et au début tout se passa convenablement ; un jeune cardiologue me prit en charge rapidement et une fois ayant entendu les renseignements que je lui avais fournis concernant mon état général de santé et après m’avoir fait un électrocardiogramme, me rassura partiellement en me précisant que ce n’était pas un infarctus  « mais seulement une angine de poitrine », mais qu’il fallait me garder en observation pour me faire faire d’autres examens et analyses, notamment un dosage de la « troponine »  pour savoir si je pouvais être transféré à une clinique de Tunis pour une meilleure prise en charge.

 

Je connaissais personnellement le directeur propriétaire de cette clinique  nabeulienne ; nos parents respectifs avaient été des amis très proches et j’étais à priori dans les meilleures dispositions d’esprit, sûr d’être entre de bonnes mains. Je n’étais donc pas du tout paniqué et ma famille ne l’était pas outre mesure; mais dans les minutes, puis les heures qui suivirent, les évènements se chargèrent de nous mettre les nerfs à vif.

 

Installé dans une chambre individuelle du premier étage, je fus connecté à « un scope » pour surveiller en continu ma tension artérielle minimale et maximale ainsi que mon pouls, sauf que le  fameux scope  était défectueux comme l’indiquait clairement une mention clignotante sur son écran."capteur défaillant"!

 

Je devais certainement être un peu trop fébrile, et comme l’infirmière qui avait installé ce scope se préparait à quitter la chambre, je lui fis remarquer nerveusement que quelque chose ne fonctionnait pas convenablement.

 

Piquée au vif par mon ton, et sûrement insuffisamment préparée à ce travail pour savoir que les patients admis en urgence ne pouvaient qu’être nerveux et éventuellement agressifs, elle me répliqua avec une certaine véhémence, « qu’elle connaissait son métier et que le scope fonctionnait convenablement ». Je la renvoyai brutalement de ma chambre lui demandant « de plus y mettre les pieds tant que j’y serais » et demandai à sa collègue accourue à mes cris, de faire savoir au directeur que je voulais le voir.

 

Comme tous les faux jetons de son espèce, ce triste sire évita de se montrer, ayant sans doute été chapitré sur mon état de surexcitation du moment.

 

J’aurais compris qu’il n'apparaîsse que plus tard, pour me laisser le temps de me calmer, mais il opta pour la délégation et m’envoya, le lendemain matin, une femme médecin qui écouta mes doléances placidement et quitta ma chambre sans faire aucun commentaire, ce qui n’empêcha nullement son requin de patron de me faire facturer son apparition passive de deux minutes, trois fois plus cher que les prestations du cardiologue  …

 

La veille, la deuxième aide soignante qui me prit en charge, fit ce qu’il fallait pour remettre en marche le scope en remplaçant certains de ses accessoires défectueux…Et le cardiologue réapparut quelque temps après pour me signifier qu’il devait me garder pour la nuit, le deuxième dosage de la troponine ayant indiqué une augmentation,  bien que minime, interdisant néanmoins mon transfert immédiat à Tunis et nécessitant une médication urgente sur place. Il me fit savoir qu’il viendrait me voir le lendemain matin pour s’assurer que mon état permettrait mon transfert à Tunis et que cela se ferait alors par ambulance médicalisée …Et à ma question tendant à savoir s’il était possible que ce transfert se fasse dans ma voiture neuve équipée de tout le confort, il se montra très récalcitrant, me signifiant que cela comportait des risques que, ni lui, ni la clinique n’accepteraient alors de prendre et qu’il faudrait, le cas échéant, signer une décharge, les libérant de toute responsabilité…   

 

Personnellement, j’aurais signé toutes les décharges nécessaires, mais mon épouse et ma fille aînée, alarmées par la perspective de se retrouver seules à me véhiculer et par la survenue éventuelle de complications en cours de route, opposèrent leur véto angoissé ; elles furent confortées en cela par l'avis de mon cardiologue tunisois qui me recommanda de ne prendre aucun risque et m’assura qu’il se chargera de me faire admettre dans la meilleure clinique de la banlieue nord et de faire ce qu’il fallait pour circoncire les effets et séquelles de cet incident cardiaque.

 

C’est ainsi que le lendemain, après une nuit où ni moi, ni ma fille Ashraaf ne pûmes fermer l’œil à cause du bruit infernal produit, toutes les deux minutes, par le fameux scope de très mauvaise qualité de cette clinique qui n’en mérite sûrement pas le label, et après un retard de plusieurs heures sur l’horaire prévu, on me fit savoir que la fameuse ambulance médicalisée était prête à assurer mon transfert.

 

Nous dûmes en fait attendre une heure de plus, pour que le moteur de l’ambulance refroidisse, ayant enregistré une surchauffe consécutive à un déplacement de cent kilomètres !!! Cela promettait d’être assez réjouissant…

 

Et en matière d’ambulance médicalisée, à défaut du meilleur, j’eus droit au pire …

 

Un ambulancier apparut dans ma chambre, me coucha énergiquement sur un brancard boiteux, fourra mes effets de toilettes entre mes jambes et, tandis qu’une infirmière visiblement affolée par sa brusquerie s’évertuait de maintenir la potence à laquelle pendait le flacon de sérum qui continuait à me perfuser et dont il ne se préoccupait visiblement pas, engagea le brancard dans un monte-charge, avec encore moins  de délicatesse que s’il avait eu affaire à un sac de patates, voire à un cadavre déjà roidi ad aeternam …Et je me retrouvai, en moins de deux, charrié dans une vieille estafette déguisée en ambulance agonisante, toujours couché sur le dos, sur le même brancard bancal, la tête dans le sens de la circulation et les pieds vers la vitre arrière du corbillard, ce qui me permit de voir ma famille angoissée me faisant des signes se voulant rassurants avec des mines par trop culpabilisées pour être crédibles… et des physionomies déjà endeuillées.

 

L’ambulancier démarra sur les chapeaux de roues et le vieux tacot commença à tanguer  secouant le brancard sur lequel j’avais grande peine à me maintenir malgré les sangles qui étaient censées m’empêcher d’être balloté. La jeune infirmière était affolée et essayait de me soutenir et d’empêcher le brancard de chavirer, ce qu’il manquait de faire à chaque virage… bien entendu, je me mis à engueuler le chauffard, en l’insultant presque, et en lui intimant l’ordre de réduire sa vitesse et de faire plus attention à ma sécurité, en pure perte ; il se contenta de m’assurer, avec la plus grande mauvaise foi, que tout allait bien et qu’il ne roulait qu’à 80kms à l’heure et il fit glisser la vitre qui séparait son compartiment du reste de la camionnette pour mettre un point final à toute velléité de  nouvelle protestation.

 

Je fus saisi d’un accès de rage indescriptible et Dieu sait ce que j’aurais pu faire si j’avais une arme à ma disposition, mais j’étais plus qu'impuissant, handicapé par une déficience cardiaque,  ligoté sur mon brancard miteux, incapable de faire le moindre geste, tout à la merci de ce salopard d’ambulancier, incompétent et dénué de tout scrupule humain ou professionnel.

 

L’infirmière qui m’accompagnait était visiblement incapable de m’apporter le moindre secours et encore moins de moduler le comportement cavalier de ce pseudo-ambulancier. Assise sur le  rebord intérieur du garde-boue, elle se contentait de s’accrocher à mon brancard, autant pour le maintenir en place que pour garder son propre équilibre ; et de me lancer, de temps à autre, un regard désolé ; et je me gardai bien de lui demander de rapporter à son lâche de directeur le comportement qu’elle avait tout loisir d’observer, sachant bien que cela ne servirait strictement à rien...

 

Je devais avoir fait ce trajet Nabeul/Tunis des milliers de fois dans ma vie, mais couché sur le dos et voyant défiler le paysage à l’envers à travers le hublot arrière crasseux, j’étais incapable de me situer, ni de savoir combien de temps j’allais devoir encore subir cette torture et, étant sous perfusion continue depuis deux jours, je fus saisi d’un besoin incompressible d’uriner.

 

Je demandais à l’infirmière de me donner un urinoir, pour m’apercevoir que cette ambulance médicalisée (sic), n’en disposait pas !

 

En fait, en matière de matériel ‘médical’, il y avait bien une bombonne anti-incendie, vide, si cela se trouve… et une boîte à pharmacie contenant, peut-être, des pansements, mais je n’eus pas le loisir de le vérifier : incapable de me retenir davantage, je parvins à me démener pour sortir mon sexe, à le diriger vers le chauffard pour essayer de l’atteindre par mon jet sous pression à travers la petite fente de la vitre cloison qu’il avait entr’ouverte pour indiquer à l’infirmière qu’il ne savait pas si l’ambulance disposait d’un urinoir.

 

Malheureusement pour moi, mon jet ne parvint pas à l’atteindre et je dus me résoudre à le rediriger vers le côté, pour ne pas risquer de m’inonder ou d’asperger la pauvre infirmière qui s’était retournée, en se voilant en plus la face de ses mains, pour éviter de me voir en cette position choquante voire ridicule !!

 

Quelques longues minutes plus tard, le chauffard freina assez brutalement devant la clinique « Les berges du Lac »  de Tunis ; et une minute après, j’eus l’impression, vraie, d’avoir quitté une clinique du quart monde, pour être accueilli par un personnel haut de gamme, dans une clinique d’un monde autrement plus civilisé où l’honnêteté et surtout les compétences étaient de rigueur et largement confirmées, sauf quelques rares exceptions. J'y reviendrai, peut-être !!

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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